10 juin 2008

Guerre contre la recherche - mobilisation le 19 juin

Je copie ci-dessous l'appel syndical à la mobilisation contre le démantèlement du CNRS, qui vient de repartir d'un nouveau mouvement de découpe - appel à la mobilisation le 19 juin, date du CA qui doit entériner la reconfiguration éclatée :

Syndicat National des Travailleurs de la Recherche Scientifique
CNRS – INSERM – INRIA – IRD – INED – INRETS - INRP

Communiqué du SNTRS-CGT

Le 19 juin se tiendra le conseil d'administration du CNRS qui doit entériner la reforme exigée par le gouvernement. Vendredi 6 juin, nous avons reçu le «Point d'étape de la politique du CNRS sur les Instituts nationaux du CNRS » et la nouvelle version du schéma stratégique.

Le premier texte montre que la direction du CNRS a fini par accepter les orientations fixées par Valérie Pécresse dans son article au journal le Monde du 21 mai 2008, et qu’elle s‘oriente vers le démantèlement rapide du CNRS.

Le CNRS sera découpé en 6 instituts :
- l'Institut National de Physique Nucléaire et de Physique des Particules (IN2P3) - l'Institut National des Sciences de l'Univers (INSU)
- l’Institut National des Mathématiques et de leurs Interfaces (INMI)
- l’Institut National de Physique et Nanosciences (INPN).
- l’Institut National de Chimie (INC).
- l’Institut National d’Ecologie et Biodiversité (INE)

Les sciences de la vie, l’informatique et les sciences humaines et sociales sont soumis à des régimes spécifiques.
● Les sciences de la vie, seront constituées en un département qui ne sera qu’une partie d’un ensemble incluant l’INSERM, l’INRA et le CEA. La coordination des sciences du vivant sera installée à l’Inserm. La recherche biomédicale (Inserm, CNRS, CEA) sera pilotée par les huit instituts ce l’Inserm. Le fait de ne pas avoir confié le leadership au CNRS qui couvre l’ensemble de la biologie indique la volonté d’orienter une grande partie des sciences du vivant vers les applications thérapeutiques. Pour l’aspect de la biologie liée à l’agronomie, on ne connaît pas encore les modalités de l’organisation. L’avenir définitif de ce département sera fixé fin 2008 au moment de la signature du contrat d’objectifs entre le CNRS et l’Etat
● Pour le département STII, seule la partie informatique est abordée en la plaçant sous le co-pilotage de l’INRIA et du CNRS. Pas un mot sur l’avenir des disciplines de l’ex département SPI (section 9 et 10). Son avenir sera fixé lui aussi dans le contrat d’objectifs.
Les sciences humaines et sociales en sont pas crées en tant qu’institut. Leur organisation sera elle aussi décidée plus tard. : « La légitimité potentielle de transformation du département actuel en un institut national des sciences humaines et sociales est forte. Une telle démarche demande cependant un travail supplémentaire de structuration de ce champ qui devra voir son aboutissement lors de l'établissement du contrat pluriannuel d'objectifs du CNRS ». Le pouvoir (gouvernement et présidence) a donc fait fi des propositions de la direction du département SHS et des scientifiques se ce secteur. [je souligne]

Que dire du renvoi des points litigieux de l’organisation de la science dans trois secteurs importants (SDV, informatique et SHS) au contrat d’objectifs ? Le contrat d’objectifs résulte de la négociation entre l’Etat et le CNRS des financements et des moyens en personnels. Il les fixe pour la durée du contrat. C’est donc labo par labo, poste par poste (en terme de budget et de personnels) que les choses seront décidées. Migus l’avait précisé : il y aura redéploiement du CNRS. Le premier acte se jouera dès le semestre prochain.

La nouvelle version du schéma stratégique implique la modification du décret de 1982 portant sur l’organisation du CNRS. Ce sera le ministère qui créera les instituts et en nommera les directeurs, contrairement au décret actuel où cette responsabilité revient au président du centre. C’est le signe clair que l’Etat veut affaiblir le CNRS en s’assurant du contrôle effectif des instituts qu’il pourra rapidement rendre autonomes. La réforme de ce décret risque également de balayer la présence des scientifiques élus par leurs pairs dans les instances des instituts, puisque la transformation des départements MIPPU, Chimie et EDD en instituts liquide de fait les conseils scientifiques de départements.

La direction du CNRS n’essaie même plus de se faire passer pour les défenseurs de la recherche fondamentale. Après avoir feint de vouloir préserver l’essentiel elle met en œuvre sans sourciller. Le projet de règlement intérieur du Comité National qui doit être soumis au CTP laisse entrevoir les nouvelles étapes de la réforme : réduction drastique des missions du Comité National (évaluation des laboratoires supprimée et statut des chercheurs sérieusement remis en cause).

Le Conseil scientifique du CNRS et les sections du Comité National, de même que les instances scientifiques universitaires (CNU) ont été mises devant le fait accompli, sommées de discuter des contours et de la structuration interne des instituts sans jamais avoir eu à se prononcer sur l’opportunité d’une telle organisation. Les propositions des Directions scientifiques, ou celles des instances scientifiques (Conseil Scientifique, Conseils Scientifiques de Département, sections du Comité National) ont été dédaignées. Pire, Mme Pécresse a annoncé la création d’instituts avant même que les instances statutaires de l’organisme aient été convoquées. Comment exprimer plus clairement le mépris de la démocratie et des instances statutaires, dont le ministère devrait pourtant être le garant ?

Au-delà de la structuration des instituts, c’est la question de la démocratie qui est posée : la procédure a été imposée, la volonté de pilotage est marquée par la décision du ministère de créer les instituts et de nommer leurs directeurs, l’éclatement pour mieux piloter est prévisible. C’est aussi la transformation des modes de financement (par appel d’offre qui bride la liberté de recherche), de la politique de l’emploi qui privilégie la précarité, la volonté de réviser le statut de titulaire et le mode d’affectation des personnels. C’est enfin la participation des scientifiques, chercheurs et ITA, aux décisions, le et les rôles respectifs du CNRS et du ministère qui sont en jeu.

Aujourd’hui, dans tous les pays, contrairement à ce que dit le gouvernement, ce sont encore des représentants élus par les scientifiques qui décident des orientations fines de la science (dans les conseils, les agences, etc.). En France on impose une organisation qui concentre les décisions entre les mains des ministères, des nommés et des dirigeants sur le modèle d’organisation des entreprises. On instaure un fonctionnement où la concurrence est présentée comme le seul facteur du progrès : concurrence entre les institutions, concurrence entre les laboratoires, concurrence entre les personnes.


Le SNTRS-CGT appelle l’ensemble des personnels de la recherche et de universités à défendre la liberté de recherche. Le 19 juin doit être une très grande journée de mobilisation. Le conseil d’administration du CNRS ne doit pas se tenir.

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