Voix épiques
Akhmatova, Césaire, Hikmet, Neruda
Sous la direction d’Olivier Kachler
La réduction moderne de la poésie au seul lyrisme n’est peut-être pas étrangère à sa minoration, qui l’appauvrit en la repliant sur elle-même, comme une affaire privée, occultant ainsi la force éthique et politique dont les poèmes sont pourtant porteurs. L’épique est un nom possible de cette force : engageant un rapport à l’histoire et au collectif, cette catégorie, encore trop souvent associée à des archaïsmes, pourrait ainsi constituer un enjeu critique pour la poésie moderne, dont elle demeure l’impensé. Une telle approche incite donc, au-delà de l’épopée, comme genre constitué et daté, à réfléchir à une historicité de l’épique, comme valeur, par une historicité des poétiques, comme leur lieu d’invention. L’idée d’une permanence de la poésie épique, alors, se déplace : celle d’un genre devient celle d’un problème, à reprendre depuis la modernité. Mais la politique d’une écriture ne recouvrant pas forcément celle de son auteur, un tel point de vue implique d’interroger les modes de signification spécifiques aux poèmes. C’est ce qu’on appelle ici la voix, au sens d’une vocalité propre à l’écriture qui met en oeuvre, comme son mouvement même, un continu du dire à travers le dit. La voix comme poème (ou le poème comme voix) devient alors le lieu d’une utopie du collectif. En ce sens, il peut sembler nécessaire, aujourd’hui, d’envisager une épicisation du lyrisme.
C’est une telle perspective que les chercheurs ici réunis ont explorée, dans les oeuvres d’Anna Akhmatova, Aimé Césaire, Nâzim Hikmet et Pablo Neruda.
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