21 octobre 2007

Parutions : la littérature dans le capitalisme tardif

Outre les traductions d'oeuvres théoriques anglaises et américaines majeures qui commencent à arriver en rangs serrés, mais aussi avec un retard d'appropriation frappant (Fredric Jameson, Homi Bhabha, Stanley Fish...), trois titres récents à noter :

  • Storytelling. La machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits, de Christian Salmon (auteur d'un article du Monde diplomatique dont j'avais parlé au premier séminaire Actualité critique). Paris, La Découverte, octobre 2007, 235p. Une enquête en effet "ébouriffante" (je cite), sur les noces néocapitalistes troubles du management des subjectivités avec la littérature, et ses Humanités. A rappocher des analyses de Jameson dans le tout récemment traduit, donc, Postmodernisme ou la logique culturelle du capitalisme tardif (trad. Florence Nevoltry, Paris, ENSBA, sept. 2007). A rapprocher aussi, si on en a le coeur, à l'usage disciplinaire de la référence à la littérature dans la "Lettre aux éducateurs", adressée par N. Sarkozy aux enseignants à la rentrée 2007 (téléchargeable).
  • Le Capitalisme cognitif. La nouvelle grande transformation, de Yann Moulier-Boutang (Editions Amsterdam, mai 2007). Pour suivre ce fil que Jameson nous mettait déjà dans les mains en 1984 (c'est la "logique culturelle" qu'il analyse dans le capitalisme post-industriel), et qui gagne ces temps-ci une visibilité, et une prégnance pour l'intelligence du présent et ses repères idéologiques, très élargies : par exemple avec le Rapport Lévy-Jouyet (Rapport de la Commission sur l'économie de l'immatériel, intitulé "L'économie de l'immatériel. La croissance de demain" - 2006) pour le côté droitier, mais aussi le traitement de la question de "l'immatériel" et son rapport au travail depuis des zones marxistes de la pensée, avec Multitude. Guerre et démocratie à l'âge de l'empire, Michael Hardt et Toni Negri, La découverte, 2004.
  • Lire, interpréter, actualiser. Pour quoi les études littéraires?, d'Yves Citton, à paraître le 26 octobre aux Editions Amsterdam. On imagine qu'il fera un pendant assez révélateur à la leçon inaugurale d'Antoine Compagnon au Collège de France : La Littérature, pour quoi faire? (Collège de France / Fayard, mai 2007. Dénomination de la chaire : "de Littérature française moderne et contemporaine : histoire, critique, théorie"). De quoi instruire la question par laquelle l'université et les disciplines sont tenues par les techniques bien rôdées de la mobilisation, la réforme, et l'urgence, à cette rentrée scientifique : la valeur sociale des études littéraires, et des sciences humaines plus largement (on ira même bientôt jusqu'à : les sciences, tout court, il semble).

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